La manipulation de l’opinion pour 2014 commence : La création d’un “Collectif parlementaire sur la refondation de l’Europe”
Sept députés UMP, dont Henri Guaino, ancien conseiller spécial de Nicolas Sarkozy, ont annoncé, lundi 22 juillet, la création d’un « Collectif parlementaire sur la refondation de l’Europe », avec pour objectif une « réorientation de la construction européenne ».
Ces 7 parlementaires sont cornaqués par Julien Aubert, député UMP de Vaucluse et très récemment sélectionné par les Américains comme un « Young Leader » de la « French American Foundation » (FAF).
Il va sans dire que plusieurs grands médias (Nouvel Observateur, Les Échos, Capital, RMC, etc.) ont, séance tenante, consacré des articles et des tribunes à cet événement considérable où les 7 protagonistes ne représentent pour l’instant qu’eux-mêmes.
Il va sans dire aussi que ces mêmes médias continuent de refuser, avec une admirable constance depuis plus de 6 ans, de consacrer le moindre mot à l’UPR, de reprendre le moindre des communiqués de presse que nous leur adressons. À l’évidence nos bientôt 3200 adhérents et nos dizaines de milliers de sympathisants qui nous lisent sur nos différents vecteurs Internet, ne représentent rien en comparaison des 7 députés en question.
Reprenant en chœur la dépêche de l’Agence Reuters, ces médias bien dociles nous apprennent donc ce qui suit :
« Ces 7 élus, pour la plupart membres de la Droite populaire, l’aile droitière du parti, dénoncent “le règne de la pensée unique” qui interdit à leurs yeux toute alternative “au motif qu’il n’y aurait qu’une seule politique possible.”
Dans un communiqué, ils critiquent le “fédéralisme qui ne dit pas son nom” et qui a “voulu à marche forcée et à rebours de la volonté des peuples construire un super-État européen, devenu une aberration politique et démocratique”.
Les élus estiment qu’un peu plus de 10 ans après la mise en place de l’euro, il est nécessaire “d’établir un diagnostic lucide sur la monnaie unique et engager le débat au sein de nos partis respectifs”, plus particulièrement à l’UMP.
Selon eux, le système actuel est caractérisé “par la désindustrialisation de l’Europe, l’exacerbation des égoïsmes nationaux et la fuite en avant vers toujours plus de fédéralisme”. »
L’UMP affûte les dents de son râteau électoral
Naturellement, si Le Nouvel Observateur, Capital, RMC et Les Échos ouvrent leur colonne à un Young Leader de la FAF pour critiquer durement l’Europe et pour dénoncer sans rire « le règne de la pensée unique », ce n’est évidemment pas que les rédacteurs en chef auraient soudain été touchés par la grâce de l’euroscepticisme et le souci de la liberté d’expression. C’est qu’il y a quelque chose à comprendre.
Qu’y a-t-il à comprendre ?
Eh bien tout simplement que l’UMP a décidé de commencer à préparer la campagne pour les élections européennes de 2014.
Le parti de Jean-François Copéfillon est en train d’allumer un contre-feu, avec une répartition des rôles en forme de râteau :
- à un bout, les dents du râteau “Barnier” ou “Lellouche” qui seront chargées de ratisser les électeurs ultra-européiste ;
- à l’autre bout, les dents du râteau “Myard” ou “Guaino” ou “Droite populaire” qui seront chargées de ratisser les électeurs eurosceptiques et qui joueront pour cela la scène du « Retenez-moi ou je fais un malheur ! » :
- et au centre les dents du râteau Copé, Fillon et autres « NKM » qui prendront la pose du rassembleur en appelant à la synthèse de la carpe et du lapin.
La « suggesto-politique »
Bien entendu, rassurons tout de suite ceux qui auraient des doutes : jamais, au grand jamais, le « Collectif parlementaire sur la refondation de l’Europe » ne proposera aux électeurs de sortir de l’Union européenne, de l’euro et de l’OTAN. De façon exactement identique à la tactique usée jusqu’à la corde par d’autres, et tout spécialement par le Front National, il restera dans le domaine de l’équivoque, des phrases à double entente, des déclarations fluctuantes, bref de la manœuvre sciemment ambiguë et trompeuse.
Comment fonctionne cette ruse que j’appelle la « suggesto-politique » ?
Elle consiste à entretenir dans l’esprit des électeurs la confusion entre le fait de dénoncer une situation et le fait de proposer un remède clair et sans ambiguïté pour sortir de cette situation.
Ainsi, le « Collectif parlementaire sur la refondation de l’Europe » lancé par le nouveau Young Leader de la FAF escompte bien que le fait de « critiquer le “fédéralisme qui ne dit pas son nom” » sera sur-interprété par les électeurs comme la promesse d’y remédier, et que le fait de dénoncer « un super-Etat européen, devenu une aberration politique et démocratique » sera compris par les électeurs comme la promesse d’en sortir.
Or, ce n’est bien entendu et justement pas le cas.
Car, si l’on relit attentivement la dépêche Reuters citée précédemment et reprise par tous les médias, la seule promesse bien tangible et bien concrète de ce « Collectif parlementaire sur la refondation de l’Europe », c’est… « d’établir un diagnostic lucide sur la monnaie unique et engager le débat au sein de nos partis respectifs ».
Bref, 21 ans après le référendum sur le traité de Maastricht et 8 ans après le rejet de la « Constitution européenne » par 55% des électeurs français, les médias nous présentent comme une information d’importance la création d’un « Collectif parlementaire sur la refondation de l’Europe » dont la seule proposition concrète est… d’engager un débat !
Pigé ?
Un affreux manque d’imagination
Cette volonté de se moquer du monde et de manipuler de façon abjecte les électeurs se voit d’ailleurs au manque d’imagination pathétique dont font preuve ces petits messieurs.
Car l’idée de « refondation de l’Europe » est à peu près aussi éculée que l’idée de « l’Autre Europe » dont elle est l’exact synonyme.
- Ainsi l’éditorialiste Jean d’Ormesson appelait-il déjà à une « refondation de l’Europe » dans un papier publié dans le Figaro du 11 mai 2010, il y a plus de 3 ans.
- Ainsi Nicolas Sarkozy, encore à l’Élysée, appelait-il, lui aussi, à une « refondation de l’Europe » dans un discours prononcé à Toulon le 1er décembre 2011. Il y a plus d’un an et demi.
- François Bayrou, président du MoDem, a appelé, lui itou, à une « refondation de l’Europe » lors d’une réunion publique à Strasbourg le 6 mars 2012. Il y a un an et 4 mois.
- Pierre Laurent, le Secrétaire national du Parti « communiste » français et par ailleurs président du Parti de la Gauche européenne (PGE) a appelé, lui également, à à une « refondation démocratique de l’Europe » dans un communiqué officiel du PCF diffusé le 10 octobre 2012. Il y a plus de 9 mois.
- Dans ces conditions, l’annonce à grands sons de trompe de la création, le 22 juillet 2013, d’un « Collectif parlementaire sur la refondation de l’Europe » revêt un caractère tout simplement ridicule.
Deux vérités toutes bêtes
Aux esprits ingénus qui se demanderaient pourquoi Nicolas Sarkozy n’a justement pas « refondé l’Europe » alors qu’il était président de la République, et par quel miracle le « Collectif parlementaire sur la refondation de l’Europe » composé de 7 députés de terrain y parviendrait davantage que le chef de l’État en personne, je rappellerai deux vérités toute bêtes.
- 1ère vérité : pour « refonder l’Europe », pour « changer d’Europe », pour « promouvoir une autre Europe », etc., etc., il faudrait modifier de fond en comble les traités européens.
Notamment sur des sujets absolument essentiels comme :
- la libre circulation des mouvements de capitaux (article 63 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne – TFUE – qui est à l’origine de toutes les délocalisations industrielles),
- l’imposition de politiques de régression sociale (article 121 du TFUE),
- le démantèlement des services publics (article 106 du TFUE),
- l’indifférence complète de la BCE au chômage et à la désindustrialisation et l’interdiction de monétiser une partie des déficits publics (articles 123 et 282 du TFUE),
- la destruction de notre agriculture soumise à des contraintes de productivité à outrance (articles 32 et 39 du TFUE),
- la subordination à l’OTAN (article 42 du traité sur l’Union européenne – TUE),
- etc., etc.
- 2ème vérité : pour procéder à ces modifications essentielles, il faudrait obtenir L’UNANIMITÉ des 28 États membres de l’UE (depuis l’entrée de la Croatie le 1er juillet, l’UE compte 28 membres).
J’insiste une nouvelle fois car il faut bien comprendre ce que ce besoin d’unanimité implique.
Obtenir l’unanimité, cela signifie par exemple :
- obtenir que le Royaume-Uni, les Pays-Bas et le Luxembourg donnent leur accord à la fin de la libre circulation des capitaux,
ET aussi :
- obtenir que le Portugal, le Royaume-Uni et les pays de l’est donnent leur accord à la fin de la subordination à l’OTAN,
ET aussi :
- obtenir que l’Allemagne, la Finlande et les Pays-Bas donnent leur accord à une gestion beaucoup plus inflationniste de la BCE,
etc.
L’observateur impartial et lucide se dit intuitivement qu’il est infiniment moins probable d’obtenir de pareils revirements à 180° des positions de nos partenaires que d’obtenir des “FEMEN” qu’elles fassent vœu de chasteté et entrent au carmel.
La probabilité mathématique d’une « Autre Europe », ou d’une « refondation de l’Europe », est quasi-nulle.
Mais il est utile de dépasser ce stade de l’intuition et d’avoir une approche scientifique : quelle est la probabilité mathématique d’avoir 28 États d’accord au même moment sur une « refondation de l’Europe » ou sur un « changement d’Europe » radical.
Je rappelle ici la démonstration mathématique que j’ai faite récemment dans ma conférence sur « les 10 raisons de sortir de l’UE » : https://www.youtube.com/watch?v=Ch5Bfe5j29A (à partir de 4’30’’).
Si l’on postule – pour simplifier – que, la probabilité que les électeurs élisent une majorité de gauche social-démocrate est de 50% dans chaque État de l’UE (et qu’elle est de 50% pour choisir une majorité de droite libérale), alors, la probabilité que les 28 États de l’Union européenne aient une politique unanime pour changer les traités européens dans un sens « de gauche social démocrate » est donc actuellement de (0,5) ^28 = 0, 375 x 10(puissance-8).
Soit l’équivalent de 3 heures tous les 100.000 ans.
Autant dire rien.
Et encore cette estimation est-elle largement surévaluée puisqu’elle fait abstraction des divergences d’intérêts nationaux entre les 28 États, divergences qui font que, par exemple, les partis sociaux-démocrates (de type PS français, SPD allemand, PSOE espagnol, Labour britannique, etc.) sont très loin d’avoir les mêmes programmes.
Et si l’on postule, maintenant, que, la probabilité que les électeurs élisent une majorité de type « Front de gauche » ou de type « Front National » est de 15 % dans chaque État de l’UE (ce qui est un taux très, très largement surestimé), alors, la probabilité que les 28 États de l’Union européenne aient une politique unanime pour changer les traités européens dans le sens voulu par le « Front de gauche » ou par le « Front National » français est donc actuellement de (0,15)^28 = 2,84 x 10(puissance-23) = 0,000 000 000 000 000 000 002 845 chances sur 100.
Soit l’équivalent probabiliste de 0,9 seconde tous les 10 trillions d’années (10 milliards de milliards d’années). C’est-à-dire qu’une telle occurrence n’a jamais eu l’occasion de se produire depuis la création de l’Univers…
Encore ce dernier calcul est-il grossièrement favorable, je le rappelle, puisqu’il ne tient pas compte de deux éléments décisifs :
– d’une part la divergence irréductible des intérêts nationaux, qui rend beaucoup plus compliquée encore toute entente entre 28 États, même dans l’hypothèse où ils seraient tous dirigés par des gouvernements partageant les mêmes orientations politiques ;
– d’autre part le rôle tutélaire des États-Unis dans la prétendue « construction européenne » : même si aucun européiste ne le dit jamais, toute réforme substantielle de l’Union européenne est impossible sans avoir le feu vert discret de Washington.
Lorsque l’on voit comment les gouvernements français, espagnol, portugais et italien ont obéi avec le doigt sur la couture du pantalon dès que Washington leur a demandé d’intercepter l’avion du président bolivien Evo Morales, on imagine ce qu’il en serait si d’aventure Washington tapait du poing sur la table en exigeant le retrait d’une réforme de l’UE qui n’aurait pas l’heur de lui plaire….
Conclusion ?
Elle est simple.
Ce « Collectif parlementaire sur la refondation de l’Europe » n’est que l’un des nombreux leurres qui va être mis en avant dans les médias, au cours des mois qui viennent, afin de tenter d’empêcher le peuple français de découvrir l’UPR et de découvrir par la même occasion qu’il existe un moyen juridique, irréfutable, et simple, de sortir du désastre : l’article 50 du traité sur l’Union européenne (TUE) qui permet une chose et une seule : sortir de l’Union européenne.
Il n’en tient qu’à nous tous de démasquer dès maintenant toutes ces manœuvres et de rassembler le plus grand nombre possible de Français sur nos analyses et notre programme.
François ASSELINEAU