Nicole Bricq annonce qu’elle part en Indonésie pour promouvoir l’exploration offshore de Total à Bornéo
UN MOIS APRÈS, MA PRÉDICTION SE RÉALISE !
Nicole Bricq, ministre du Commerce extérieur, vient d’annoncer ce 23 juillet au soir qu’elle se rendra très prochainement en Thaïlande et en Indonésie
« pour aider les entreprises françaises dans la conquête de ces marchés. »
Se félicitant que « la forte croissance des pays d’Asie du Sud-Est couplée à des projets d’infrastructures ambitieux sont autant d’opportunités pour l’industrie française », celle qui fut ministre de l’Écologie et du développement durable pendant un mois a décidé de prendre son baluchon pour aller aider les entreprises françaises à décrocher des contrats.
Le communiqué officiel publié par son cabinet précise qu’après une rencontre avec le ministre indonésien de l’Énergie et des ressources minérales, M. Jero Wacik, elle a décidé de filer à Djakarta « pour que le partenariat stratégique bilatéral signé en 2011 se traduise de manière concrète notamment dans le domaine énergétique. »
Pour ménager les susceptibilités, le communiqué précise que l’Agence française de développement (AFD) pourrait financer des équipements dans le domaine de énergies renouvelables. Mais si Madame Bricq va traverser la planète, c’est pour soutenir deux gros dossiers autrement plus importants :
– d’une part faire du lobbying en faveur du groupe Eramet qui « a un vif intérêt pour l’exploitation d’une mine de nickel et de cobalt à Weda Bay ainsi que pour le projet d’une usine de transformation dotée d’un procédé hydrométallurgique dans la Province des Moluques Nord, sur l’île d’Halmahera.
– d’autre part aider le pétrolier Total à participer à l’exploitation d’un champ gazier off-shore dans le Delta du Mahakam.
Pour information, le Mahakam est le fleuve principal de la province indonésienne de Kalimantan oriental, dans l’est de l’île de Bornéo. Il s’écoule vers l’est pour se jeter dans le détroit de Makassar près de la ville de Samarinda. Son delta, où dominent les palétuviers, est une zone très sensible d’un point de vue écologique….
MES COMMENTAIRES
Je rappelle à ceux qui l’auraient oublié :
a)- que Mme Bricq avait été nommée ministre de l’Écologie et du développement durable le 16 mai ;
b)- qu’elle avait annoncé à la presse, le 13 juin, avoir décidé avec son collègue du “Redressement productif” Arnaud Montebourg, une remise à plat des permis de forage off-shore en Guyane française.
L’impétueuse ministre avait alors déclaré : « Je remets à plat tous les permis. Je remets donc à plat le permis de la société Shell en Guyane ». Pour justifier sa position, elle avait invoqué
« l’attachement du gouvernement à la protection de la faune marine et de l’environnement » [sic] et avait affirmé qu’elle ne disposait « d’aucune garantie » de la part de Shell.
c)- que cette décision avait été aussitôt annulée par François Hollande et Jean-Marc Ayrault, suite aux pressions de Shell et des élus guyanais,
d)- que ce pataquès avait valu à Mme Bricq d’être virée comme une malpropre du gouvernement le 21 juin.
e)- et que, toute honte bue, Mme Bricq avait accepté d’être nommée ministre du Commerce extérieur, en lot de consolation.
Ces péripéties, qui prouvaient que François Hollande ne tardait pas à remiser aux oubliettes toutes ses promesses électorales, m’avaient incité à écrire un article, publié sur notre site et sur Agoravox le 22 juin 2012, dont la conclusion était la suivante :
Conclusion
Un mois et demi après son élection à l’Élysée et 4 jours seulement après le second tour des législatives, toutes les associations environnementalistes affirment qu’il « y a de quoi douter de la sincérité » de François Hollande… Après le bobard des euro-bonds, voici un quinquennat qui commence décidément très fort et très vite.
Cerise sur le gâteau : Mme Bricq, au lieu de quitter dignement le gouvernement, a accepté d’être nommée… ministre du commerce extérieur. À ce titre, elle va désormais arpenter la planète pour promouvoir les intérêts commerciaux français.
Mme Bricq aura donc, par exemple, pour tâche de faire feu de tout bois :
– pour vendre des Airbus qui détruisent la couche d’ozone,
– pour vendre des centrales nucléaires Areva en Chine,
– ou pour obtenir des contrats d’exploration off-shore pour Total au Myanmar (Birmanie), en Méditerranée ou dans la Caspienne.
Arnaud Montebourg va pouvoir se consoler : non, il ne sera pas le seul ministre à avaler son chapeau matin, midi et soir, en contrepartie d’une voiture avec chauffeur et gyrophare.
http://www.upr.fr/actualite/france/hollande-nicole-bricq-ecologie
Eh bien, il aura suffi d’un mois, presque jour pour jour, pour que ma prédiction se réalise !
Ce n’est certes pas au Myanmar mais en Indonésie que Mme Bricq se rend. Mais elle y va bien pour soutenir un dossier Total d’exploration off-shore. À Bornéo, le pays des orangs-outans (et aussi pour soutenir le projet minier et métallurgique d’Eramet aux Moluques).
Bien entendu, les deux entreprises françaises précisent que leurs projets sont respectueux de l’environnement. Mais c’était aussi ce que Shell affirmait au large de la Guyane.
CONCLUSION
Bien entendu, c’est le rôle du ministre du Commerce extérieur que de partir soutenir les entreprises françaises qui se battent à l’exportation.
J’en sais quelque chose puisque je fus moi-même, il y a bientôt 20 ans, au cabinet du ministre du Commerce extérieur. Et ce n’est pas non plus à moi qu’il faut souligner l’importance vitale, pour notre pays, d’être davantage présent dans toute l’Asie.
Mais ce que je stigmatise ici, c’est le comportement personnel de Mme Bricq. Un comportement de politicarde, si caractéristique de la mentalité des dirigeants politiques contemporains.
Tous ces gens sont capables de changer d’opinion à 180° en l’espace de 48 heures, uniquement pour satisfaire leur plan de carrière et leur vanité. Ils n’ont pas la moindre conviction. Et ils ont encore moins le sens de l’honneur et des convenances.
C’est pourquoi les engagements politiques et les indignations de Mme Bricq et de ses semblables sont à géométrie variable. Elle s’inquiétait de la préservation du biotope des toucans, des agoutis de Guyane et des dauphins de l’Amazone lorsqu’elle était ministre de l’Écologie et du développement durable ? Devenue ministre du Commerce extérieur, elle n’a plus rien à faire du saccage de l’habitat des orangs-outans, des nasiques et des pythons réticulés de Bornéo.
Comme cette attitude d’opportuniste est la quintessence des politicards français, il ne faut pas douter un instant que le retournements de veste peuvent concerner tous les sujets, y compris les plus stratégiques.
Préparons-nous donc à contempler un spectacle grandiose lorsque la Grèce quittera l’euro.
Après avoir poussé des cris d’orfraie à la moindre mise en cause du bien-fondé de l’euro, et après avoir collaboré pleinement au système dictatorial européiste, tous ces messieurs-dames retourneront leurs vestes en 24 heures avec un aplomb extraordinaire.
Ils se battront sans vergogne à qui se précipitera le premier sur les plateaux de télé et de radio pour expliquer que la fin de l’euro en Grèce est “certes regrettable”, mais que “c’est mieux ainsi” et que, d’ailleurs, ils “avaient toujours pensé que la Grèce n’avait pas sa place dans l’euro”…
S’ils ne veulent pas être encore une fois roulés dans la farine, il va donc falloir que les citoyens redoublent de vigilance. Car des retournements de veste sur l’euro et sur l’UE, il va y en avoir une épidémie dans les semaines, les mois et les années qui viennent.
François ASSELINEAU