Hollande : Jouer du luth devant des boeufs (对 牛 弹 琴)
La porte-parole du gouvernement, Mme Najat Vallaud-Belkacem, nous a réservé une information de taille ce mercredi 25 juillet 2012, à la sortie du Conseil des ministres.
Elle a en effet informé la presse que « le message du président est au fond que les États devaient avoir une réactivité équivalente à celle des marchés. »
Pas de problème, il suffisait d’y penser !
Poursuivant sur cette lancée prometteuse, Mme Vallaud-Belkacem nous a confirmé l’admirable finesse d’analyse de François Hollande : « Concernant les mises en perspective négatives par l’agence de notation Moody’s de plusieurs pays européens dont l’Allemagne, le propos était plutôt de relativiser les choses. »
Eurêka ! Il suffisait d’y penser : au fond, cette décision n’était donc qu’une bricole.
Au passage, François Hollande a-t-il remarqué que la Finlande avait été épargnée et pourquoi elle l’a été ? Mystère…
(cf. http://www.upr.fr/actualite/monde/moodys-mes-allemagne-notation-europe)
Enfin, la porte-parole du gouvernement a conclu sur cette phrase martiale du locataire de l’Élysée : « M. Hollande a affirmé la nécessité absolue de mettre rapidement en œuvre les engagements du sommet européen de Bruxelles. »
Et que ça saute, scro-gneu-gneu !
DES PROPOS MARTIAUX QUI S’ADRESSENT À QUI ?!?
L’esprit public a été tellement lobotomisé par la propagande européiste que plus personne ne réagit au caractère burlesque de ce genre de déclaration présidentielle.
Car enfin ! Ce n’est pas entre les murs de la salle des colonnes de l’Élysée qu’il faut donner des coups de menton pour mettre en œuvre les pseudo-décisions du 19ème Sommet de la dernière chance (Sommet dont je ne me lasserais jamais de répéter que le journal Le Monde avait assuré ses lecteurs qu’il avait « fait plier Mme Merkel ».)
François Hollande croit-il vraiment qu’il est dans le pouvoir d’Hélène Conway-Mouret, de Guillaume Garot, de Nicole Bricq, d’Anne-Marie Escoffier, de Frédéric Cuvillier, de Sylvia Pinel, de Marie-Arlette Carlotti, d’Alain Vidalies, de François Lamy, de Valérie Fourneyron, d’Arnaud Montebourg, de Delphine Batho, de Victorin Lurel, de Stéphane Le Foll, de George Pau-Langevin, et autres Excellences, de « mettre rapidement en œuvre les engagements du sommet européen de Bruxelles » ? !
En réalité, M. Hollande est dépourvu de tout pouvoir vrai sur le cours des choses puisqu’il ne dépend pas de lui – et heureusement d’ailleurs ! – que les gouvernements allemand, néerlandais et finlandais acceptent de plumer leurs peuples pour financer les banquiers espagnols.
Pour donner l’impression qu’il agit, il en est donc réduit à lancer à la cantonade des propos martiaux qui tombent dans le vide puisqu’il ne s’adresse qu’à une poignée de subordonnés qui n’en peuvent mais.
YAKA FOKON : L’EXEMPLE DE MANUEL VALLS IL Y A 10 MOIS
En se comportant de la sorte, François Hollande reprend à son compte l’inépuisable réflexe du « YAKA FOKON », que j’avais déjà analysé, voici 10 mois (le 13 septembre 2011), dans une situation à peu prés identique, mais qui concernait alors M. Manuel Valls. (cf. http://www.upr.fr/actualite-facebook/gouvernement-de-la-zone-euro-et-eurobonds-la-demagogie-europeiste-de-manuel-valls).
À l’époque, celui qui était encore candidat à la primaire PS et qui est devenu ministre de l’Intérieur au mois de mai 2012, était allé
« dans la banlieue lyonnaise » pour gratifier son public de ses solutions mirobolantes pour résoudre la crise de l’euro.
a) M. Valls avait expliqué, devant un public de banlieusards médusés par ces belles paroles, que la crise financière était « une crise de gouvernance de l’euro ».
Ce qui, si l’on y réfléchit un instant, ne veut strictement rien dire, mais qui en impose aux béotiens.
b) Puis M. Valls avait estimé que le problème tenait au fait « que les dirigeants européens donnaient le sentiment d’agir avec un peu de retard ».
Notons que cette rhétorique du retard à l’allumage est exactement la même que celle reprise ce 25 juillet 2012 par François Hollande lorsqu’il nous informe, par Mme Vallaud-Belkacem interposée, « que les États devraient avoir une réactivité équivalente à celle des marchés. »
c) enfin, voici 10 mois, M. Valls nous avait fourni sa solution :
– « Il faut aujourd’hui un gouvernement économique et monétaire de la zone euro. » […]
– « Il faut mettre en place des Eurobonds, c’est-à-dire des prêts à des taux acceptables pour les pays qui sont actuellement en difficulté. »
– « Il y a deux voies que je récuse : la sortie de la Grèce de la zone euro et (…) la recapitalisation des grandes banques française”. »
En bref, M. Valls disait n’importe quoi, comme la suite le prouve désormais aux yeux de tous. Il proposait des solutions bidons, dont tous les connaisseurs savaient qu’elles ne seraient jamais acceptées par nos partenaires. Des milliers de lecteurs sont témoins que e n’ai cessé de le dire et de l’écrire à l’époque, comme depuis des années !
Et comme M. Valls savait parfaitement qu’il se moquait du monde avec ses solutions bidons, il allait raconter ses salades « dans la banlieue lyonnaise » parce qu’il tablait cyniquement sur l’ignorance de son public pour l’enfumer.
Comme je l’avais dit à l’époque, ces belles propositions, c’est à Berlin, à Francfort, à Athènes, à Washington, à La Haye, à Rome, à Helsinki, à Madrid, à Lisbonne, qu’il fallait aller les asséner ! Plutôt que de jouer les matamores « dans la banlieue lyonnaise », M. Valls devait prendre son courage à deux mains et aller voir les économistes allemands en leur lançant qu’il « faut mettre en place des Eurobonds » et nous aurions vu comment il aurait été reçu.
Mais il est vrai que Manuel Valls se fichait éperdument de la vérité et de l’honnêteté intellectuelle. La seule chose qui comptait à ses yeux, c’était d’obtenir un portefeuille ministériel, avec la rémunération, les photos dans les journaux, les gardes du corps et les voitures à gyrophare.
Et cela a marché puisqu’il faisait partie des Excellences qui ont entendu aujourd’hui le même genre de propos bidons dans la bouche de celui qui a gagné la primaire PS.
Car François Hollande n’est pas différent de Manuel Valls, pas plus d’ailleurs que de tous les responsables politiques européistes ou alter-européistes. En pérorant aujourd’hui sur « la nécessité absolue de mettre rapidement en œuvre les engagements du sommet européen de Bruxelles », il sait parfaitement que ses ministres n’ont pas plus de pouvoir que lui de mettre en œuvre ce qu’il dit. Il se contrefiche éperdument de la vérité et de l’honnêteté intellectuelle, il ne fait qu’une énième opération de « com’ ».
CONCLUSION : « JOUER DU LUTH DEVANT DES BŒUFS »
Il existe plusieurs locutions françaises qui permettent de résumer de façon narquoise l’attitude de François Hollande de ce Conseil des ministres : « parler pour ne rien dire », ou bien « flûter dans un violon ».
Mais je trouve que les expressions chinoises à peu près correspondantes sont plus frappantes parce que plus imagées.
Parmi les meilleures, il y a :
– « Trop de paroles tuent l’action » (言 多 伤 幸 yán duō shāng xìng)
– « Gratter une démangeaison à travers sa botte » ( 隔 靴 搔 痒 Gé xuē sāo yǎng)
Mais ma préférée pour le cas d’aujourd’hui me semble être : « jouer du luth devant des bœufs » (对 牛 弹 琴 – duì niú tán qín )
Je sais que ce n’est pas très révérencieux pour notre Conseil des ministres. Mais c’est tellement bien vu, non ?
François ASSELINEAU