Le secrétaire national du PS à la francophonie donne raison à l’UPR en s’insurgeant contre la loi Fioraso !
Pouria Amirshahi, Député des Français de l’Étranger (Maghreb/Afrique de l’Ouest), Secrétaire national du Parti socialiste à la Francophonie, et Rapporteur de la Mission d’information parlementaire sur la Francophonie, vient de jeter un beau pavé dans la mare, en prenant position contre la loi Fioraso !
Nous publions ci-dessous sa “Note d’Information” en date d’hier (11 avril 2013) et rendue publique aujourd’hui.
C’est une véritable bombe.
Parti Socialiste
NOTE D’INFORMATION SUR LE PROJET DE LOI D’ORIENTATION SUR L’ENSEIGNEMENT SUPÉRIEUR ET LA RECHERCHE
Le 20 mars 2013, la ministre de l’Enseignement supérieur et de la Recherche, Geneviève Fioraso, a présenté son projet de loi d’orientation de l’Enseignement supérieur et de la Recherche (ESR) en Conseil des ministres. Celui-ci comporte en son article 2 une disposition portant directement atteinte au statut de la langue française, actuellement langue de l’enseignement, des examens, concours, thèses et mémoires, et à la francophonie.
« Des exceptions peuvent également être justifiées par la nature de certains enseignements lorsque ceux-ci sont dispensés pour la mise en œuvre d’un accord avec une institution étrangère ou internationale tel que prévu à l’article L. 123-7 ou dans le cadre d’un programme européen. » (Article 2 du projet de loi ESR modifiant l’article L121-3 du Code de l’Education).
Cet article met à mal la loi Toubon de 1994 relative à l’emploi de la langue française – et trop souvent contournée ! – qui réaffirme que la langue de la République est le français, en vertu de l’article 2 de la Constitution. L’article 2 du projet de loi ESR pourrait ainsi se révéler inconstitutionnel.
La loi Toubon ne tolérait que deux exceptions au principe selon lequel, « la langue de l’enseignement, des examens et concours, ainsi que des thèses et mémoires dans les établissements publics et privés d’enseignement est le français ». Des exceptions « justifiées par les nécessités de l’enseignement des langues et cultures régionales ou étrangères ou lorsque les enseignants sont des professeurs associés ou invités étrangers » et le cas des « écoles étrangères ou spécialement ouvertes pour accueillir des élèves de nationalité étrangère, ainsi que les établissements dispensant un enseignement à caractère international. » (art. 11 § 1).
De très nombreuses initiatives se sont multipliées contre cet article du projet de loi ESR, portées notamment par quarante associations de défense de la langue française, l’Académie française et plusieurs écrivains. Je partage la plupart des inquiétudes formulées à ce stade, dont le principe est le risque manifeste d’une progression de l’anglais dans le monde universitaire et de la recherche, au détriment du français.
Si l’objectif affiché est de proposer des formations en langue étrangère afin d’accroître le rayonnement international des universités françaises, et ainsi attirer davantage d’étudiants étrangers des pays émergents non francophones, l’enseignement supérieur en France dispose déjà d’atouts considérables. Le faible coût de l’enseignement, l’intérêt culturel, la valeur des diplômes français sur le marché local, mais aussi les immenses
débouchés que représentent les marchés du travail de l’espace francophone, en Amérique du Nord, en Afrique comme en Europe, sont autant de ressources pour le rayonnement universitaire de la France. N’oublions pas que notre pays se classe au quatrième rang mondial des pays accueillant des étudiants étrangers et qu’il n’y a pas lieu d’être alarmiste. D’autant plus que la connaissance de la langue française est la première raison mise en avant par les étudiants étrangers qui choisissent notre pays pour leurs études supérieures.La langue française ne doit donc surtout pas être sacrifiée sur l’autel de « l’attractivité ». Ne nous leurrons pas : en proposant des cursus en anglais au détriment du français, nous n’attirerons pas les meilleurs étudiants étrangers anglophones, qui continueront à s’orienter vers les universités américaines, britanniques ou australiennes. Nous courrons par contre le risque de marginaliser les étudiants francophones et ceux souhaitant apprendre notre langue. Je plaide pour ma part pour accorder la priorité d’accès aux francophones et aux étudiants désireux de le devenir.
L’anglais, certes nécessaire pour donner leur chance aux étudiants français sur la scène internationale, est déjà présent dans les cursus. Il me semblerait par conséquent plus opportun de renforcer des mesures visant à faciliter leur mobilité, comme une lisibilité accrue des dispositifs d’accueil, d’accompagnement et d’aide.
En outre, il ne faut pas perdre de vue que l’anglais est devenu la langue majoritaire d’accès à l’information scientifique. Privilégier l’utilisation de l’anglais revient à entretenir sa primauté et met à mal la recherche française. De nombreux chercheurs francophones et français sont systématiquement confrontés à cette réalité puisqu’ils sont contraints de produire leurs travaux en anglais, et non plus en français, afin d’être financés et publiés. Cette tendance au « tout anglais » nuit à la création de savoirs et favorise un conformisme scientifique en négligeant la richesse qu’apportent les travaux effectués en français, notamment en termes de structures de pensée et de publics visés.
A travers cette disposition de l’article 2, ce sont non seulement les échanges culturels, éducatifs et scientifiques francophones qui sont fragilisés mais aussi le développement économique et social de l’espace francophone qui a besoin d’être renforcé. La France ne sortira que fragilisée d’un affaiblissement de l’espace francophone.
Au moment où s’affirment les sociétés civiles en Afrique méditerranéenne et subsaharienne, la francophonie active doit jouer pleinement son rôle. Plus que jamais l’histoire immédiate commande de promouvoir un espace francophone intégré. Les enjeux sont connus :
– la réorganisation en cours de l’espace économique de l’Afrique de l’Ouest ;
– la cohérence d’un projet méditerranéen partagé avec nos amis de Tunisie, du Maroc et d’Algérie en particulier ;
– l’impérieuse nécessité de renforcer la cohésion des Etats francophones dans une Union européenne qui s’anglicise ;
– la préservation de notre alliance stratégique avec le Canada et plus particulièrement le Québec.Notre noble engagement pour la diversité culturelle et linguistique ne saurait avantager plus encore la langue anglaise – qui n’en a guère besoin – dans notre système d’enseignement supérieur de recherche.
Par conséquent, je demande le retrait de l’article 2 du Projet de loi ESR.
Pouria Amirshahi
Député des Français de l’Étranger (Maghreb/Afrique de l’Ouest)
CONCLUSION
Le Secrétaire national du Parti socialiste à la Francophonie reprend en substance le raisonnement que l’UPR dénonce depuis 5 semaines !
Bien qu’il s’agisse sans doute d’une tentative de récupération politique de notre pétition qui est près d’atteindre les 8000 signatures, nous accueillons à bras ouvert cette déclaration.
Elle montre, mieux que de longs discours, l’état de décrépitude politique et programmatique du Parti Socialiste et, au-delà, de toute la sphère politique française.
Je conseille :
- 1°) à M. Pouria Amirshahi de démissionner du PS et de rejoindre l’UPR
- 2°) à tous nos lecteurs de se mobiliser toujours plus pour signer notre pétition
François ASSELINEAU