Bruno Le Maire jette déjà le masque : pas question que le “grand débat national” touche à l’ISF, ni à l’IS, ni à quoi que ce soit d’important !

Lecture : 4 min

Beaucoup de monde en avait l’intuition, mais au moins les choses ont été clarifiées de façon nette et précise par le ministre de l’Economie et des Finances sur Europe 1 ce dimanche 6 janvier 2019.

Interrogé par les journalistes sur ce que serait la portée du “grand débat national” lancé par Macron à partir du 15 janvier, Bruno Le Maire a tenté d’endormir les auditeurs par une formule creuse à souhait :

« Je crois profondément que le grand débat, c’est la meilleure manière de réconcilier les Français, de les ramener à la table des discussions. Les Français ont des choses à nous dire. »

Mais, pressé par les journalistes pour savoir si ce “grand débat” pourrait déboucher sur des revendications bien concrètes, par exemple sur le rétablissement de l’ISF, Le Maire a été catégorique :

« Que les Français veuillent le rétablissement de l’ISF, on le sait, ce n’est pas une grande nouveauté. Il se trouve qu’Emmanuel Macron a été élu président de la République sur la base d’un projet qui comprend une transformation fiscale en profondeur, votée par une majorité de Français. Donc je ne souhaite pas que nous revenions sur l’ISF, sur le prélèvement forfaitaire unique ou sur la baisse de l’impôt sur les sociétés qui doit permettre à nos entreprises de se développer. »

Devant les journalistes visiblement éberlués par ce discours complètement déconnecté des réalités d’une France en ébullition, le ministre a poursuivi en fermant d’emblée la porte à tout changement significatif de politique :

« Il ne s’agit pas que le débat conduise à détricoter tout ce qui a été voulu par les Français au moment de l’élection présidentielle, et tout ce qui a été voté depuis. Sinon qu’est-ce qu’on va faire ? On va avancer en reculant. En règle générale, ça ne mène pas très loin ».

Commentaires : un “grand débat” pour enfumer les Gilets jaunes

Les lecteurs des analyses de l’UPR comprennent parfaitement pourquoi M. Le Maire a tout de suite mis le holà : “grand débat” ou pas, il est hors de question de rétablir l’ISF ou de relever le taux de l’IS puisque la suppression de l’un et la baisse de l’autre ont été décidées pour satisfaire aux exigences de la Commission européenne dans le cadre des rapports des Grandes Orientations des Politiques Économiques (GOPÉ).

Le ministre s’est évidemment bien gardé d’expliquer aux auditeurs d’Europe 1 le rôle décisif de l’UE en la matière. Les journalistes aussi.

Mais alors ? Si le “grand débat” se voit interdire d’emblée le droit de proposer le rétablissement de l’ISF et la hausse de l’IS, on imagine sans peine ce qu’il va advenir de réformes bien plus importantes !

Quel que soit l’artifice de présentation employé, le “grand débat” ne conduira évidemment pas à un référendum sur le Frexit, ou à une sortie de l’euro, ou à une sortie de l’OTAN. Le “grand débat” n’aura pas davantage le droit de créer un RIC permettant de révoquer le président de la République ou les ministres, ou de conduire des réformes constitutionnelles, ou d’abolir une loi, ou de proposer une loi (sauf peut-être dans des domaines très marginaux).

En bref, le “grand débat” n’est lancé que dans le seul objectif manipulatoire de noyer le poisson, de lasser les Gilets jaunes par des parlottes sans fin, et d’esquiver le VRAI débat qui doit avoir lieu sur notre appartenance à l’UE et à l’euro lors des européennes.

Au total, le “grand débat” sera orienté pour que la montagne accouche d’une souris. Et la souris devra être parfaitement européiste et macron-compatible : par exemple, la diminution du nombre de parlementaires ou la suppression de quelques départements.

Toute la question est de savoir jusqu’à quand Macron va continuer impunément à se payer la tête des Français.

FA
06/01/2019