Certaines théories du complot sont vraies – la pire de toutes étant l’Union européenne – par James Delingpole du Telegraph
Avis au lecteur : Nous proposons à la lecture cet article de l’écrivain et journaliste britannique James Delingpole car il nous semble intéressant et stimulant mais cela n’implique pas que l’UPR partage toutes les vues exprimées dans ce texte ou dans d’autres de ses écrits.
Certaines théories du complot sont vraies – la pire de toutes étant l’Union européenne – Par James Delingpole, son blog sur le site Internet du Telegraph, le 28 mars 2009
L’autre soir, j’ai passé un agréable moment avec l’un de mes chroniqueurs de gauche préférés – un homme auquel il arrive de se tromper mais qui est plutôt du genre équilibré, David Aaronovitch. Nous discutions de son dernier livre, qui est excellent, Histoires de vaudou. Un livre que vous devriez adorer si vous ne croyez pas aux théories du complot, mais qui dans le cas contraire risque fort de vous énerver.
Vous êtes d’avis que le 11 septembre est un complot monté par le Mossad (d’où ces 4 000 juifs auxquels on aurait dit de rester chez eux ce jour-là) ? Ou par une supra-race reptilienne du nom d’illuminati ? Ou par le gouvernement des États-Unis lui-même, qui aurait abattu les tours jumelles à l’aide de missiles déguisés en avions de ligne – selon un expert du MI5, David Shyler – et ce grâce à une sorte de dispositif holographique ? Eh bien, Aaronovitch va vous décevoir. Ce n’était rien de tout cela, mais le fait d’un type qui s’appelle Oussama Ben Laden.
Il rejette tout autant la possibilité que des agents véreux du MI5, en service commandé pour l’État, aient pu éliminer, dans les années 80, une vieille dame occupée à cultiver des roses, Hilda Murrell, sur présomption d’anti-nucléarisme (eh bien non, c’était juste le fait d’un malencontreux cambriolage). Que la Princesse Diana ait été éliminée par le Duc d’Édimbourg (eh bien non, c’était un accident de voiture) ; que Kennedy ait été assassiné conjointement par plusieurs groupes d’intérêt (eh non, c’était un tireur solitaire – il y a eu des précédents dans ce domaine – du nom de Lee Harvey Oswald) ; que Jésus et Marie-Madeleine ont eu un enfant caché dont la lignée a été gardée secrète de génération en génération grâce à des gens comme Léonard de Vinci (non, non, trois fois non) ; que la mafia a administré des barbituriques à Marylin Monroe sous forme de lavements (eh non, c’était juste une overdose) ; et ainsi de suite.
À vrai dire, il n’y a qu’un passage avec lequel je ne suis pas d’accord. Ce sont quelques lignes anodines au début du livre, où Aaronovitch se moque d’un chapitre intitulé : « L’Union européenne démasquée : la révélation d’une dictature », rédigé par une ancienne fonctionnaire du ministère de la Défense, Lindsay Jenkins. D’après Aaronovitch, ce chapitre « explique en détail le complot des eurocrates pour détruire les États-nations ».
« À un moment donné, Jenkins laisse entendre que le soutien au régionalisme est un des éléments de cet obscur complot, qui vise à affaiblir les Européens pour les empêcher de s’opposer au concept d’un supra-État ». Elle explique : « Cette insistance concernant l’usage des langues minoritaires, en particulier dans le système éducatif, permettra d’isoler les petites communautés et limitera les conditions propices à la réussite des gens dans le monde extérieur. Cela fera d’eux des citoyens de seconde zone plus faciles à contrôler. Toutes les assemblées régionales auront de multiples services de traduction qui contribueront à leur inefficacité. » Une théorie que, selon moi, l’on pourrait résumer ainsi : « comment l’usage du gallois a réussi à détruire le Royaume-Uni ».
Derrière cette plaisanterie pleine de morgue d’Aaronovitch se cache l’affirmation implicite – ce qu’aucune personne un tant soit peu sensée ou raisonnable n’oserait imaginer – que l’UE est un complot visant à priver les États-nations de leur suprématie et à ôter tout pouvoir aux peuples. Mais c’est pourtant bien ce qui est en train de se passer – alors non, il ne s’agit pas d’une théorie du complot, mais bel et bien d’un complot réel.
Si ce charmant, ce brillant et en général ce délicieux (sauf dans le cas présent) Aaronovitch était parvenu à assimiler le meilleur et le plus complexe exposé jamais écrit sur l’UE – La Grande supercherie de Christopher Booker et Richard North [NDT : ce livre sorti en 2005 dont le titre original complet est The Great Deception: Can the European Union Survive ? n’a pas encore été traduit en français] – il aurait pu comprendre tout cela.
Voici un résumé de leurs arguments tels que je les rapporte dans « Comment avoir raison » (n’hésitez pas à sauter des passages, certains extraits sont à la fois longs et très déprimants, et ce d’autant qu’ils ne font que refléter la stricte vérité : c’est le seul morceau du livre que je n’ai pas réussi à rendre drôle parce que rien dans l’UE ne prête à rire).
« Peu importe l’étendue de vos connaissances sur l’UE, dites-vous bien que c’est pire encore ». L’une des raisons de notre ignorance sur tant de sujets d’importance est l’ennui qu’ils nous procurent. Cet ennui est si grand que, hormis ceux qui travaillent sur le projet de l’UE, personne ne prend la peine de lire ce qui est écrit en tout petit. Et la principale raison en est que le secret, la désinformation et la propension au mensonge ont été constitutifs de la construction du projet dès le départ.
La chose principale à savoir au sujet de l’UE est que son but final est d’arriver à une union politique générale, et non à une simple union économique. Ce que ses créateurs – dont un ancien marchand de cognac, Jean Monnet – avaient compris très tôt, c’est qu’aucun électeur n’accepterait de voir son pays perdre sa souveraineté en contrepartie de la promesse farfelue d’un idéal paneuropéen. Ils se rendaient bien compte qu’il faudrait mener ce processus d’intégration sans fin à l’insu de tous (ou, pour reprendre le terme qu’utilisent ceux qui sont dans le secret, par le biais de l’engrenage, c’est-à-dire d’une progression à petits pas).
« Les Anglais ont longtemps résisté. Mais dans l’accès de doute qui suivit la crise de Suez, le gouvernement d’une Grande-Bretagne post-coloniale sur le déclin se tourna vers le continent, y vit ce qu’il imagina être une nouvelle puissance économique mondiale et prit peur au point de décider qu’il devait coûte que coûte rejoindre cet imposant bloc commercial.
Pour cela, il lui fallut mentir à son peuple. Dès l’époque de Harold MacMillan, les dirigeants politiques britanniques savaient pertinemment que l’enjeu allait au-delà d’un simple bloc commercial et qu’il consistait à créer une organisation supranationale afin de retirer tout pouvoir aux gouvernements nationaux. Mais s’ils l’avaient admis, ils se seraient mis à dos le peuple britannique, aussi fier qu’indépendant. Donc, durant des années, les gouvernements britanniques successifs ont tous présenté à leurs électeurs l’intégration européenne comme un problème de nature économique, mais surtout pas politique. »
« Rarement en matière de duplicité politique, un premier ministre britannique n’est allé aussi loin dans le mensonge que Edward Heath en janvier 1973. Il déclarait alors à la télévision : « Certains dans ce pays craignent qu’en rejoignant l’Europe nous ne sacrifions notre indépendance et notre souveraineté. Ces peurs, était-il besoin de le dire, sont totalement infondées ».
Dès 1970, date à laquelle Heath contraignit la Grande-Bretagne à entrer dans le marché commun (sans légitimité démocratique aucune puisque le sujet avait à peine été évoqué lors de sa campagne) il promit que rien n’allait arriver, mais tout arriva. »
« L’adhésion à l’Union européenne a profondément changé la Grande-Bretagne – de manière irrémédiable et pas pour le mieux. On nous a forcés à détruire notre industrie de pêche (puis à regarder, impuissants, les chalutiers espagnols, français, néerlandais et belges piller les mers qui longent nos côtes, elles qui furent en leur temps les plus poissonneuses du monde). Nous avons signé des directives insensées qui ont détruit nos abattoirs, paralysé notre industrie chimique et défiguré nos paysages avec des éoliennes. On n’aura bientôt plus le droit de boire des pintes de bière ni même de choisir comment nous défendre. Cela nous a coûté beaucoup d’argent (en impôts et en bureaucratie) et nous a privés d’une partie de notre liberté.
Au fond de nous, nous le savons. Alors comment se fait-il que l’Europe continue à grandir inexorablement alors qu’un grand nombre des peuples qui la composent la contestent ? C’est parce que cela, tout comme les mensonges entourant ses objectifs, a toujours fait partie du plan. Le labyrinthe complexe de l’appareil européen – la Commission, le Parlement, le Conseil des Ministres, la Cour de Justice – fut conçu à la fois pour semer la confusion et éviter d’avoir des comptes à rendre ; pour permettre à l’UE de s’agrandir, indépendamment du nombre de « non » que sa constitution a recueilli lors de référendums locaux.
Il est tout de même extraordinaire qu’au moment où fleurissent les théories du complot, la plus grande d’entre toutes à l’heure actuelle – qui, de surcroît, est avérée – soit à ce point ignorée par un aussi grand nombre, et depuis si longtemps. Il est révélateur que la seule enquête d’envergure sur le sujet – La Grande supercherie de Christopher Booker et Richard North – n’ait fait l’objet d’aucun article dans les diverses presses nationales.
L’Union européenne a été LE plus grand désastre politique depuis la Deuxième Guerre mondiale. Il est difficile de reconnaître être l’auteur d’une erreur aussi énorme et terrible. Trop énorme, sans doute. Pas étonnant donc que l’on s’obstine à éviter le sujet. On semble croire que, si on parvient à ne plus y penser pendant suffisamment longtemps, cela finira peut-être par disparaître comme par magie. Mais c’est faux. »
C’est compris, Aaronovitch, espèce d’ex-communiste étatiste, partisan du tout règlement ? Non, mais !
Article traduit de l’anglais (Royaume-Uni) par le groupe traduction de l’UPR.